Cet article est à retrouver sur le site internet du Bonbon Nuit, lieu premier de sa publication.
- Si tu veux te prendre de l’avant-garde survolté dans la tronche : FEU-FOLLET
Le futur en ouverture, le roi agonise sur son lit de mort. Le petit-fils flatule son irrespect autour du vieil homme plongé dans ses souvenirs, celui de quitter une bourgeoisie agonisante pour une bien plus noble mission, celle de devenir pompier. Et à travers cette quête de bonté, rencontrer l’amour bien monté. Liberté et modernité de ton, et au-delà de sa fantaisie parfois déroutante, Feu-Follet interroge en à peine une heure l’emprise colonialiste blanc, la mort d’un fragile écosystème par les flammes, s’amuse de la prétendue virilité hétéro du pompier bien gaulé pour la détourner en une danse phallique et poétique. Le fond lui reste féroce, lorsque l’on sait s’aventurer hors de son image au grain « branché ». Et tout bascule alors dans une réflexion qui nous dépasse, mais qui fait l’essentiel, interroger.
On y va ? Pour la fièvre sexuelle, libre et moderne
On passe ? Pour la déroutante mise en scène qui peut perdre
« Feu-Follet » de J.P. Rodrigues – sortie le 14 septembre
- Si tu veux te convaincre pour la 26ième fois que Hong-Sang Soo est le plus grand : JUSTE SOUS VOS YEUX
C’est d’abord une histoire de sœur, distancée par la vie, mais complice et heureuse de se revoir. Puis l’une d’elle, starlette télé désormais has-been et dépassée rencontre un metteur en scène connu, qui ne jure que par elle et sa présence pour son prochain film. Comme toujours, le saké coule et délivre les secrets. HSS continue son exploration de l’altérité de la psyché humaine dans une quête effrénée du temps perdu (2 films par année). Rien ne semble s’opposer à l’infinie mélancolie de sa mise en scène, qui s’étend sur un détail d’allure insignifiant, pour retourner l’évidence. Il n’y a désormais plus à s’interroger sur la réussite ou non d’un film de HSS, mais juste accepter que sa filmographie trace pas à pas les contours métaphysiques universels de tout âme souhaitant dérouter de son chemin auto-programmé d’une société qui n’a plus le temps. Éveilleur de conscience, acteur unique et indispensable à celui qui veut enfin réfléchir sans nuire.
On y va ? Ne pas le faire serait sacrilège, Hong-Sang Soo l’immanquable
On passe ? Abruti
« Juste sous vos yeux » de H-S. Soo – sortie le 21 septembre
- Si tu veux te rappeler le goût du BN chocolat du quatre-heures et les tablés enfumés de tes parents ivres, et encore naïfs : LIBRE GARANCE !
Ça clope et ça parle de buter Pinochet, la vinasse enivre les discussions révolutionnaires dans des Cévennes encore désertés des randonneurs moralisateurs, c’est les années 80, la naïveté de croire que tout est encore possible. Et Garance, adolescente au milieu de ce rocambolesque marché à gaucho trouve peu à peu sa place par la certitude d’être là où il faut être. Il y a donc des souvenirs d’été, les engueulades des parents, les BN humides de bord de rivière, la radio qui grésille, et les amitiés d’un été. Puis l’insouciance se transforme en révélation, le politique et les idées des parents se transcrivent par la parole puis l’acte de Garance qui comprend imparfaitement où situer la ligne grise entre le facho et le gaucho, le terroriste et le héros, la révolution et la dévotion. Garance qui construit son futur par une aventure fondatrice, non pas par l’accomplissement d’une quelconque mission, mais par une succession d’erreurs et de fausses croyances, de questionnement et d’interrogations, remèdes miracles à l’élévation intellectuelle.
On y va ? Pour la formidable Laëtitia Dosch, l’insouciance de l’adolescence et des années 80 qui nous manquent tant.
On passe ? Ça clichetonne pas mal, les personnages sont grossis, et la fin docilement ratée.
« Libre Garance ! » de L. Diaz – sortie le 21 septembre