Cet article est à retrouver sur le site internet du Bonbon Nuit, lieu premier de sa publication.
- Si tu veux te complaire dans une vomitive mascarade : SANS FILTRE
Palme d’or de la honte, Ostlünd décroche piteusement sa deuxième timbale avec cette grotesque comédie étalant sur deux heures trente interminables un propos compris en 5 minutes. Comme bon petit élève à la mèche plaquée, il détourne une réunion de bourgeois tous plus dégueulasses les uns que les autres (marchant d’arme, influenceuse teubée, marchand d’engrais) sur une croisière luxueuse, en un bain de vomi et de chiasse, grand guignol qu’il est, humiliant ses personnages dans une morale bien douteuse. Ostlünd prétend moquer la débilité capitaliste et ses outrances, alors qu’il les filme avec une telle complaisance, que son regard condescendant et prétentieux heurte, puis dégoute. Tout est si attendu, jusqu’à cet échouage sur une ile déserte où, quelle surprise, la dame-pipi devient commandante, le mannequin gigolo pour une boite Bretzels. Sans parler du propos débile sur l’inversement des rôles homme/femme dans la société. Grossier, et film de petit malin sans âme ni directive de cinéaste, Sans Filtre est un amer naufrage.
Pourquoi il faut y aller : Pour voir l’une des pires palme d’or des 10 dernières années
Mais d’un autre côté… Plus besoin de vous faire un dessin
« Sans filtre» de R. Ostlünd – sortie le 29 septembre
- Si tu veux chialer avec distance et intelligence : UN BEAU MATIN
C’est une croisée de destinée, d’un côté un père qui s’effondre, la vue le quittant par une maladie neurodégénérative, de l’autre sa fille qui tente de se reconstruire après la mort de son mari et l’annonce de l’incurabilité de la maladie d’un père qu’elle iconisait, lui le penseur professeur de philosophie, elle la traductrice littéraire. L’arrivée de Poupaud et cette romance infidèle est finalement la lecture la plus hésitante de cette merveille, balbutiant quelques scènes romantiques dans du sous Desplechin pas des plus inspirées. La force substantielle d’ « Un beau matin » est bien à travers le regard complexe de Pascal Greggory, riche et désincarné, perdu et lumineux, attentif et absent, qui à travers une vitalité le quittant, ouvre enfin un espace de bonheur et d’épanouissement à sa fille, ne supportant désormais plus le regarder s’atrophier. La construction progressive de Hansen-Løve est brillante, sa caméra prend son temps, et à force de voir Sandra s’éveiller, Georg lui s’endort dans une dernière demi-heure bouleversante.
Pourquoi il faut y aller : Pour Pascal Greggory (le père) et sa performance époustouflante
Mais d’un autre côté… Le classicisme de cet amour sur-écrit, et le jeu maladroit de l’amant et de sa maitresse peut décontenancer
« Un beau matin » de M. Hansen-Løve – sortie le 5 octobre
- Si tu veux relativiser tes galères de la semaine (le prix indécent de tes nouvelles Veja, et ta collège qui te spoile House of Dragons): BUTTERFLY VISION
Libérée après 2 mois de captivité dans le Donbass par les forces pro-russes, Lilia est de retour en Ukraine. Par le plan sur des cicatrices dorsales et la fugacité d’images de tortures, l’on comprend rapidement le drame traumatique enduré. Elle est absente, ne peut plus être touché ni dormir sans revoir des images numériques de drone (elle était spécialiste en reconnaissance aérienne) distordant sa nouvelle réalité, celle d’un impérissable cauchemar passé. Puis son ventre se distant, et c’est une grossesse qui débarque impliquant des bouleversements conséquents. Malgré un rythme malmené par un montage saccadé et aux ellipses parfois déroutantes, Nakonechnyi instaure dans un scénario, qui ne semble pourtant pas en offrir, de la nuance, sans partie pris nationaliste idiot, ni sur-esthétisation de violence, avec cette idée que le mal est partout. Y compris de son bord, et notamment par cette séquence primordiale montrant un groupuscule fasciite ukrainien détruire un camp de Rom. Tout y est poisseux, l’image glaciale, la guerre ayant dépouillée toute humanité, y compris dans les repas de famille. Jusqu’à ce que l’espoir renait, et que le vrai combat de Lilia, celui de la reconstruction et non de la soumission s’enclenche. Maigre lueur dans une obscurité profonde.
Pourquoi il faut y aller : La beauté du combat de cette femme et la nuance du propos qui épaissit la réflexion
Mais d’un autre côté… Plombant, et manquant de rythme par un montage balbutiant
«Butterfly Vision » de M. Nakonechnyo – sortie le 12 octobre