L’été au cinéma, sueur et volupté

Aller au cinéma en plein été, c’est un peu comme mettre une glace au micro-onde lorsqu’on la trouve trop froide, c’est un peu con. Mais quand on y réfléchit, ce n’est pas si abruti. Par contre, ce n’est pas dans une salle obscure que la raie blanche va se différencier de vos fesses oranges, nous sommes d’accord. Mais comment ne pas profiter des plus beaux étés filmés pour observer la sueur dégouliner sans la sentir, le soleil tapé sans que votre mère vous oblige à porter cette casquette Peugeot ridicule pour éviter l’insolation ou encore sauter d’un plongeoir sans vous éclater le bide d’un plat honteux. L’été au cinéma, c’est la certitude d’être blanc comme un cachet, mais fier de pouvoir éviter le pathétisme drainé par le vacancier.

Evacuons d’entrée le topic pistoche, entre La Piscine de Derey en 1969 et le bronzage Delonienà faire pâlir Morandini et Swimming Pool de Ozon en 2003. Mater moi ce cul de Ludivine Sagnier venant échauder nos hormones estivales de sa sensualité aquatique. Grrr.Un petit Plongeon de Frank Perry en 1968, road trip entre bassins chlorés en moule-burne sixties pour ressortir bodybuildé et la mèche toujours implacable comme Patrick Swayze dans Point Break en 1991. 

L’été, ce n’est pas que les mycoses au pied, c’est aussi le sable qui gratte et qui te colle au gland même après la douche collective duGlamourau Cap d’Agde. Mais surtout Moonrise Kingdom de Wes Anderson et sa danse improvisée en petites culottes sur une crique isolée, Jules et Jim, où l’élégance prend sa définition par la marinière de Jeanne Moreau sous son ombrelle jusqu’à 50 ans plus tard, découvrir que la plage nous sauvera tous (et Dieu aussi) avec la fin de Tree of Life de Malick. Mais la plage, l’été, c’est surtout savoir jouer du Ramones en costume blanc cassé sans se faire des auréoles qui gouttent, comme Miguel Gomes nous le fait croire dans Tabou.

Trois personnalités nous racontent leur vision du cinéma l’été, entre expérience personnelle et références indispensables. Le plateau repas exécrable d’Air France et les turbulences du Pacifique qui te décuvent de tes mignonnettes de ‘sky., pas pour Pauline Clément qui en a un meilleur souvenir. La néo- « de la Comédie Française » (à l’affiche en ce moment avec « Un chapeau de paille d’Italie ») se souvient d’un été 2013 et 8 heures d’avion devant elle. L’été au cinoche c’est pour elle un écran dans un avion et L’odeur de la papaye verte de Tran Anh Hund. « Pas de dialogues, une beauté époustouflante, et une envie terrible de détourner l’avion en mode kamikaze pour (se faire) sauter au dessus du Vietnam ».Pour l’artiste Thierry Théolier, c’est le cinoche en Marcel, « tu attends la permission parentale pour aller au ciné du village à 22 heures, une armée de moustique débarque en même temps que le film de genre pour les grands, du violent et du trippant en mode Piranhas de Joe Dante, tu captes que dalle avec des doublages d’espagnols qui sur-jouent et une bande-son bricolées ». Eté et cinéma pour notre prince des villes, l’excellent Guillaume Teyssier (Tigersushi) c’est trois films références, la décadence junkie en mode Santorin et More de Schroder, « l’autre versant du rêve hippie sur la musique de Pink Floyd »,La nuit de l’iguane de Richard Burton, « le puritanisme américain en prend pour son grade dans un coin reculé du Mexique », et The Long Goodbyede Robert Altman, « de la poussière, de la sueur et du whisky pour une enquête de bord de mer en string taille haute à Malibu ».

Le message est bien passé ? Barrez vous des plages bondées pour squatter les salles de cinés désertés !